Le moulin des Aigremonts à Bléré
Site du moulin des Aigremonts : https://www.moulindesaigremonts.com
Le Moulin des Aigremonts à Bléré, ou la résurrection d’un moulin cavier en Touraine…
Sur le plateau sud de la ville de Bléré, au lieu dit « Les Aigremonts », en bordure de la route de Loches à l’entrée de la ville, sur une éminence, subsistaient les vestiges d’un des rares moulins caviers qui ont été construits à l’Est de leur terre d’élection ! Ce monument édifié en 1848, fut longtemps considéré comme un moulin cavier sans masse, de par son aspect de tour sans aucun contrefort, comme les rares caviers ayant été construits ainsi, dont existent en Indre et Loire, ceux de Montlouis sur Loire, Saint Martin le Beau, Villiers au Bouin et le moulin des Renardières à Ligré, les seuls que nous connaissions, dont subsistent encore leurs structures, visibles sur le terrain.
Ce qui en restait permettait d’imaginer le beau moulin qu’il devait être en activité. Celle-ci fut relativement courte puisqu’il s’arrêta en 1877. La masse, la hucherolle et les ailes existaient encore en 1900 ; elles auraient disparues dans les années 1920.
Le moulin en 1990
Méconnu et ignoré du plus grand nombre depuis longtemps, sauf des « ethnologues molinologues » du monde entier, (il est cité en effet dans des ouvrages d’architectures de ces chercheurs), il s’acheminait doucement vers la ruine complète, jusqu'à ces dernières années. Il méritait pourtant d’être protégé au titre d’un patrimoine pittoresque, en voie de disparition en Touraine.
Heureusement, en 2000, un homme soucieux de la sauvegarde du patrimoine Blérois, très motivé et passionné de la faisabilité du sauvetage de ce monument, Régis Chauvel, a réussi a entraîner avec lui la Municipalité, pour dans un premier temps, acheter le monument et ensuite engager un plan de restauration, allant jusqu'à la remise aux vents du moulin ! Des travaux ont été entrepris dans ce sens, par tranches successives qui se sont étalés sur 4 ans (entre 2004 et 2007) A terme l’édifice retrouve son aspect originel et ses 18 mètres de hauteur, dominant la vallée.
Caractéristiques générales
Le moulin à vent de type cavier était construit, à l’origine, sur une structure de cave d’où son nom, adapté à la double activité de son constructeur : vigneron et meunier, comme la plupart des autres caviers de la vallée de la Loire et en particulier de l’Anjou. Le moulin de Bléré, comme ses frères à l’Est du département est conçu avec sa masse de pierres voûtées recouvertes d’argile, permettant d’entretenir à l’intérieur une certaine température constante en toutes saisons, favorable à la mouture des céréales, à l’élaboration et à la conservation du vin.
La cage de bois (hucherolle) s’articule au sommet de la tour pour orienter les ailes face aux vents, autour du pivot creux (la Huse, 6,50 m) pour laissait passer l’arbre vertical communiquant le mouvement fourni par les ailes, aux meules situées en bas dans la salle principale du milieu, « la cave », lieu de travail du meunier.
Travaux de reconstruction
On distingue quatre phases principales au cours de ces travaux qui ont été suivis par un architecte,, motivé lui aussi par cette restauration complète, unique à notre région.
En 2004, les mauvaises herbes et ronces qui envahissaient le moulin ont été enlevées et le chemin pour y accéder a été refait. Puis le massereau a été démonté pierre par pierre, numérotées, pour être replacées à l’identique, après nettoyage et retaille pour la reconstruction, qui a ainsi sécurisé l’édifice. Les raçineaux, longues pièces de bois placées de façon oblique, pour soutenir le pivot, support de la hucherolle, ont été changés.
La masse architecturale à la base du moulin qui recouvrait les caves, était de forme circulaire a été reconstruite en respectant son aspect d’origine.
La tour (massereau) s’élève du sol sur 7,50 m environ, supporte la hucherolle, dont les 4 cotés assemblés en croix de Saint André, sont recouverts d’un bardage en planches, ont 2,90 m de base sur 2,40 m de hauteur, avec une toiture en pente élevant la cage de 2,40 m environ, au faîtage.
L’ensemble s’élevant à plus de 18 m du sol. Les ailes ont une envergure de 14 mètres et sont munis du mécanisme Berton qui peut ouvrir la voilure à planches sur 2,20 m de large avec une surface utile de 40 m2 de voilage aux vents.
Les moments principaux des travaux
Le 27 juillet 2004, le nouveau pivot (appelé Huse, quatre tonnes, 6,50 mètres de haut), est mis en place par l’entreprise Croix et fils, en présence des élus de la ville et de l’équipe motivée, à la base de cette résurrection du vieux moulin.
Suivra la pose de la hucherolle en mars 2005, avec son arbre moteur, muni de son grand rouet. La construction des caves, commencée en 2004, s’est continuée en 2006, par des maçons, tailleurs de pierres de la région, motivés eux aussi, par ce travail particulier qu’ils accomplissaient pour la première fois!
Le travail de reconstruction de la masse pour ceinturer le tout, a été réalisé en partie, par des bénévoles d’un chantier école en maçonnerie et taille de pierres, qui organise des chantiers de jeunes volontaires se déroulant pendant l’été.
Enfin, le 6 décembre 2006, l’entreprise Croix posait les ailes de 14 mètres d’envergure (2x7 mètres), de type Berton, (ailes mécanisées munies de leurs planches blanches), comme à l’origine, devant des élus de la ville, des responsables de cette restauration, dont Monsieur Régis Chauvel, le principal « artisan » de celle-ci, et des représentants d’associations voisines, dont celle de l’Association des Amis des moulins de Touraine. Les caméras de télévision et des journalistes étaient également présentes, pour garder une image marquante de ce jour unique, du renouveau d’un monument, oublié depuis une centaine d’année, en Indre et Loire, venant de retrouver la vie et son âme.
En 2007, dernière phase des travaux ; finition des structures architecturales, installation de l’équipement de meunerie et aménagement de l’environnement du moulin, qui ont complété cette restauration complète, exemplaire, et unique en Touraine !
Intervenants de la restauration
L’ensemble de la restauration a été conduit par Monsieur Régis Chauvel, maître d’œuvre, assisté de Dominique Maes, architecte, de l’entreprise Jean Duhard de Bléré pour la taille de pierres des voûtes, et de l’entreprise André Croix et fils, amoulageur, de la Cornouaille Maine et Loire pour tous les travaux de Charpente.
Les bénévoles de l’association qui s’est constituée se réservant divers travaux ont été du remplissage de la masse avec moellons et pierres, complétées de terre liée à la chaux jusqu'à l’aménagement intérieur et extérieur du monument. L’Association, aujourd’hui, s’occupe de la gestion du monument, de son fonctionnement et de l’accueil des visiteurs.
Tous les acteurs de cette résurrection du moulin sont à féliciter pour leurs travaux, que ce soit l’entreprise Croix et Fils « charpentier- amoulageur », qui a de nombreuses réalisations de moulins en France et à l’étranger et a réalisé la hucherolle, les ailes et toutes les mécanismes en bois, les tailleurs de pierres, l’entreprise Duhard Jean, de Bléré, et tous les bénévoles qui ont participé depuis 3 ans à la survie d’un patrimoine pour les générations de demain !
Pose des ailes | Ailes fermées en place | |
Finition de la masse architecturale (cave) | Vue d'interieur : mécanismes d'écartement de la meule |
Trémie, auget, sonnette et archures des meules
Les Propriétaires successifs :
Bergeault Jacques, fils, cordier à Bléré, fait construire le moulin en 1848 sur la parcelle D 155 du cadastre et l’exploite jusqu’en 1868, où il le met en vente.
Popineau Joseph, piqueur de meules, achète la parcelle en 1869 (vignes et moulin) mais se heurte à la concurrence des 6 moulins à eau établis sur la rivière du Vaugerin, affluent du Cher, dont les minoteries de Bléré, qui monopolisent l’écrasement des céréales de la région, au détriment du moulin qui, en raison des « sautes d’humeur du vent ! », fonctionne par intermittence…
Le moulin cesse son activité en 1877, et ne sert plus que de cave a vins.
Fortin Duchêne Victor, gendarme à Bléré, achète cette parcelle avec moulin en 1902 et la revend en 1918.
Girard Pétilleau Joseph, boucher à Bléré, en est propriétaire de 1918 à 1937.
Tortevois René Alfred, propriétaire cultivateur, achète la parcelle et les ruines du moulin en 1937 ; la tour du moulin sert de maison de vignes et d’abri à outils, jusqu’en 1956.
Macadré Simone Joséphine, achète le moulin en 1956 et le revend à son petit-neveu, le 16 novembre 1975, Mr.Bouchet Marc, qui souhaite le restaurer.
Le moulin reste donc dans la même famille jusqu’en 2000 !
Enfin, la Mairie de Bléré, et son Maire, Monsieur Fortier, sous l’impulsion de Monsieur Régis Chauvel, et de ses amis, rachètent le moulin et les 1000 m2 de terrain qui l’entoure, le 12 février 2003.
La priorité est de le remettre totalement en état, exauçant les vœux de son dernier propriétaire !...
Propriété de la ville de Bléré, mais pour une gestion du monument, une Association « les Amis du moulin des Aigremonts » s’est créée en 2004, qui a pour objet la sauvegarde et la promotion touristique et culturelle du moulin ; l’objectif est de le faire fonctionner (moudre du grain), de veiller à son entretien, et d’organiser des visites et démonstrations pédagogiques pour les élèves des écoles de la région et l’ouvrir aux touristes en période estivale.
L’association a son Siège Social à la Mairie de Bléré 35 rue de Loches, BP 35, 37150 Bléré.
Pour tous renseignements ou adhésions à cette association, s’adresser à son Président : Mr.Régis Chauvel, en Mairie.
Cette restauration exemplaire de la résurrection complète d’un moulin cavier en Indre et Loire, impensable il y a quelques années, fait l’admiration de l’Association des Moulins de Touraine, qui a suivi les travaux depuis le début, et apporte son soutien affectif à cette nouvelle association, et à son moulin !
Gabriel-Henri Penet - A.M.Touraine
Sources :
Les documents de recherches sur l’historique du moulin, et de sa reconstruction, nous ont été fournis par le Président, et les services de la Mairie de Bléré, que nous remercions de leur aide.
Le Congrès FFAM en visite au moulin en Mai 2009